Comment peut-on philosopher avec des nibards ?



       C'était la question que se posait, mi-figue mi-raisin, un lettré de ma connaissance, après avoir animé avec brio un petit cercle d'amateurs de philosophie.

    Je vous explique un peu... la question n’était pas née tout de go... Évidemment Dame nature ayant été généreuse avec ma personne, j'étais sur le champ exclue du monde de Sophie (et alors, n’y-avait-il pas d’autres mondes moins désincarnés ?) Hannah Arendt ? Elle n'avait pas de nibards... Lou Andréas Salomé, non... non... non... non... je commençais à devenir blême... et si je me faisais Amazone ?… je l’avais un peu cherché tout de même… un peu prêcheuse de faux pour savoir le vrai...


    Ce lettré que j'apprécie pour son éloquence et sa sensibilité faisait juste un sondage. Un séminaire devait s'organiser. Le sujet proposé ne m'intéressait nullement (c'était gentil, on songeait à me faire venir). Alors, qui que quoi donc où pouvait bien intéresser alors l’amatrice de philosophie ? Que se passait-il dans ma caboche perchée sur des nibards ?

     Et bien voilà !... Les artistes hommes ont des muses, non ?  Et la muse, pour la femme artiste ? Les femmes artistes auraient-elles des museaux ?  à quoi et à qui pensait la sœur de Shakespeare quand elle écrivait ? (
Une chambre à soi, Virginia Woolf). De là, j'ai fredonné un peu honteusement le refrain de ma période chanteuse rock.

 

     "Je cherche mon museau, Car chacun son zoo, Les hommes la muse, Les femmes le museau. "


 (et je vous passe toutes les rimes usées jusqu'à la corde quoique.. médusée.. bien lunée...  c'était pas mal aiguë pour une rockeuse)." Ah !... tu voudrais peut-être nous parler du sexe de l'art ? " . " Tu penses qu'il y a une essence de la femme ? "  me suggère un compère, brillant philosophe adulant les muses. " Tu n'es pas très Simone de Beauvoir ? ". Non, Je ne pense pas que la femme soit un homme comme les autres.



     Et là, mes amis, je crois que Dieu Bacchus était passé par là... à l’improviste... je croyais rêver... j’étais blême... je suis devenue tout à fait bleue... j'ai eu droit à la Totale.


     " Une femme peut-elle avoir l'esprit de concept avec son corps ? "… "Quand elle conçoit, elle ne déborderait pas un peu en hystérie au sens noble du terme ?"... "Mais si, tu l'as lu le livre de Didi-Hubermann sur l'hystérie, la belle hystérie qui nous séduit tant les hommes" me souffle un troisième larron avec son œil balthusien… non, je n’avais pas du tout lu ce livre.


     À dix ans, j'étais déjà une philosophe.

Mon sujet favori : "Les larmes des crocodiles". À quatorze ans, c'était bel et bien fini, je pleurais pour de vrai, et je ne pouvais plus philosopher. Mais ces quatre années de philosophie sauvage m'ont fait entrevoir que la vie recelait d’une joie infinie si on la mirait par le prisme de l'ironie.  Quatre ans plus tard, ma révélation : l'ironie de Vladimir Jankélévich. Pas mal non, pour Une à Nibards ?


    L'affaire est triste...  mais je n’ai pas encore lu ce livre de Didi-Huberman, 
l’Invention de l'hystérie (je me disais bien… ce n’est que l’invention !…), Charcot et l'iconographie photographique de la Salpêtrière, Editeur Macula Eds, janvier 2001.

    Que faudrait-il me mutiler donc, pour être, Grâce à Dieu, une philosophe ? C'est dit... je deviens anorexique... et la cerise sur le gâteau... je ne plairai plus à mon museau.

    Sans rancune ?...

   Désormais la question triviale, je l’avoue, que je me pose sérieusement, à laquelle j'aimerais que vous me répondiez tous les trois, puisque nos organes influent sur nos pensées, n’est-ce pas ? Peut-on philosopher avec une quéquette dans la tête ?


 

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